Le confinement de mars-mai 2020

Dernière mise à jour le 16 mars 2021

En analysant avec des modèles mathématiques la dynamique des hospitalisations en France métropolitaine, nous avons estimé que le confinement instauré entre le 17 mars et le 11 mai 2020 avait réduit de 77% le taux de transmission de SARS-CoV-2, permettant de casser la dynamique de croissance exponentielle des hospitalisations (Salje et al, Science). A l’époque, certains ont argué que les réductions observées n’étaient pas dues au confinement mais à la dynamique naturelle de l’épidémie. D’autres se sont interrogés sur la nécessité de faire un confinement national dans un contexte où seules deux régions ont été très touchées par cette première vague. Nous avons fait une analyse simple des données d’hospitalisations par région pour répondre à ces interrogations (Cauchemez et al, Lancet). Le 17 mars 2020, les régions Grand Est et Ile-de-France étaient celles qui enregistraient le plus grand nombre d’hospitalisations de patients COVID-19 par jour. Cependant, à cette date, on observait déjà une augmentation des hospitalisations de patients COVID-19 dans l’ensemble des régions :

Abréviations : ARA – Auvergne-Rhône-Alpes ; BFC – Bourgogne-Franche-Comté ; BRE – Bretagne ; CVL – Centre-Val de Loire ; COR – Corse ; GES – Grand Est ; HDF – Hauts-de-France ; IDF – Île-de-France ; NAQ – Nouvelle-Aquitaine ; NOR – Normandie ; OCC – Occitanie ; PAC – Provence-Alpes-Côte d’Azur ; PDL – Pays de la Loire.


Dans 12 des 13 régions de France métropolitaine, le pic des hospitalisations a eu lieu en moyenne 11 jours (8-14 jours) après le début du confinement. Cette durée correspond au délai moyen entre l’infection et l’hospitalisation d’un patient COVID-19. Comme les différentes régions étaient à différents stades de la pandémie au moment du confinement, la synchronie des pics régionaux indique que c’est le confinement, et non pas la progression naturelle de l’épidémie, qui explique ces pics régionaux. Par ailleurs, au moment du confinement, la plupart des régions connaissaient une croissance exponentielle du nombre d’hospitalisations. Sans confinement rapide, il est probable que la situation épidémiologique se serait rapidement dégradée dans ces régions et aurait rapidement rattrapée l’Ile-de-France et Grand Est. Le confinement national a permis de protéger des régions qui auraient autrement vu leur situation épidémiologique se dégrader rapidement.

Avec notre collègue Lulla Opatowski, nous avons également lancé une grande étude pour mieux comprendre comment les Français avait modifié leurs comportements et leurs contacts durant le confinement (Bosetti et al, MedRxiv). Cette étude a par exemple permis d’estimer que les Français avaient en moyenne 3.3 contacts par jour durant le confinement, ce qui correspond à une réduction de 70% par rapport aux études réalisées avant la pandémie. Ces informations sont très importantes pour pouvoir correctement calibrer les modèles.

Pour en savoir plus :
  • Henrik Salje, Cécile Tran Kiem, Noémie Lefrancq, Noémie Courtejoie, Paolo Bosetti, Juliette Paireau, Alessio Andronico, Nathanaël Hozé, Jehanne Richet, Claire-Lise Dubost, Yann Le Strat, Justin Lessler, Daniel Levy-Bruhl, Arnaud Fontanet, Lulla Opatowski, Pierre-Yves Boelle, Simon Cauchemez Estimating the burden of SARS-CoV-2 in France, Science (10 Jul 2020) https://doi.org/10.1126/science.abc3517
  • Simon Cauchemez, Cécile Tran Kiem, Juliette Paireau, Patrick Rolland, Arnaud Fontanet Lockdown impact on COVID-19 epidemics in regions across metropolitan France, The Lancet (September 29, 2020) https://doi.org/10.1016/S0140-6736(20)32034-1
  • Paolo Bosetti, Bich-Tram Huynh, Armiya Youssouf Abdou, Marie Sanchez, Catherine Eisenhauer, Noémie Courtejoie, Jérôme Accardo, Henrik Salje, Didier Guillemot, Mathieu Moslonka-Lefebvre, Pierre-Yves Boëlle, Guillaume Béraud, Simon Cauchemez, Lulla Opatowski Lockdown impact on age-specific contact patterns and behaviours in France, medRxiv (2020) https://doi.org/10.1101/2020.10.07.20205104